Histoire
Journal de bord du capitaine Alaric Adarbrent
Date : 10e jour du mois de Flamerule
Le Nodus a levé l’ancre ce matin, cap vers l’ouest pour un transport de ressource. L’équipage est enjoué, les histoires de trésors et d’aventures dansent dans l’air comme une brise légère. Mais je connais cette mer, elle peut se révéler capricieuse. Chacun de mes hommes est un marin aguerri, et je ne suis pas étranger à ce que le sort nous réserve. Les tavernes des docks ont leurs charmes, mais aujourd’hui, nous sommes ici pour faire du chemin et trouver fortune.
Date : 12e jour du mois de Flamerule
Ce matin, nous avons croisé un navire pirate, leurs voiles noires se découpant contre l’horizon. Ces brigands cherchent à nous prendre pour cibles, mais je n’ai pas l’intention de leur faire le cadeau. J’ai ordonné de virer de bord pour échapper à leurs griffes. Malheureusement, la mer, capricieuse, avait d’autres projets.
Alors que nous tentions de fuir nos poursuivants, un vent soudain s’est levé, nous poussant inexorablement vers la tempête. En un instant, le ciel s’est assombri et la mer s’est transformée en un chaos rugissant. Nous avons été engloutis par des vagues monstrueuses, piégés dans un tourbillon d’ondulations et de dangers. Voilà où nous en sommes : le combat contre la tempête est inévitable.
Date : 15e jour du mois de Flamerule
Les vagues rugissent comme des bêtes affamées. On est pris dans cette tempête qui semble vouloir nous engloutir. Les voiles blanches du Nodus, d’habitude fières, se tendent à craquer sous la pression. On avait voulu fuir les pirates aux voiles noires, et voilà que cette abomination nous attire.
La mer s’est transformée en cauchemar. Le ciel est noir de nuages, une pluie goudronneuse s’abat sur nous, rendant la navigation presque impossible. L’eau sous notre coque est sombre et visqueuse, comme une mélasse maudite.
Les éclairs zèbrent le ciel, révélant par moments des formes grotesques qui émergent des profondeurs. Ces histoires de créatures mythiques que racontent les vieux marins ne sont pas des contes. Les sirènes aux chants ensorcelants, et ces ombres mouvantes, peut-être des krakens, nous observent, attendant notre chute. Mes hommes crient, la panique s’empare de l’équipage, mais je dois garder le cap, je dois leur donner espoir.
Chaque coup de tonnerre résonne comme un avertissement, la mer ne nous laissera pas partir si facilement. Je prie Heaume, le Dieu qui ne dort jamais, de veiller sur nous dans cette nuit cauchemardesque. Si nous devons périr, que ce soit en luttant contre ces vagues et non contre des fantômes.
Nous avons atteint la lisière d’un monde perdu. Quand cette tempête se calmera, je mettrai tout ça sur papier. Mais pour l’heure, il faut se battre contre ces flots, cette nuit qui semble interminable…
Date : 17e jour du mois de Flamerule
Après des jours à lutter contre cette tempête infernale, nous avons enfin aperçu une lueur d’espoir : un rivage. À notre arrivée, nous découvrons des ruines, vestiges d’un ancien monde. C’est dérangeant, mais il n’y a pas le choix, nous devons reprendre des forces. L’équipage a besoin de repos, mais je sens qu’une certaine tension règne. Je dois veiller à ce qu’ils ne s’aventurent pas trop loin. Ces ruines pourraient cacher bien des secrets, et je ne suis pas prêt à en payer le prix.

Date : 20e jour du mois de Flamerule
Les réparations avancent, mais je ne suis pas encore en paix. Le Nodus doit être en état de prendre la mer à nouveau, et le reste de l’équipage doit rester vigilant. Je ne veux pas prendre de risques inutiles. Une fois que nous aurons fait le plein de provisions et que le navire sera prêt, nous devrons quitter ces ruines. Qui sait ce qui pourrait se cacher dans l’ombre ?
Date : 23e jour du mois de Flamerule
En fouillant dans mes cartes pendant que les autres travaillent, une pensée me hante. Je scrute chaque recoin, chaque détail, mais cette île ne figure nulle part. C’est un terrain inexploré, un morceau de monde qui a échappé à la plume des cartographes. J’en prends conscience avec un mélange d’excitation et de crainte.
Norlande, signifiant « nouvelles terres ». Ce nom résonne en moi comme une promesse, mais également comme une mise en garde. L’étrange phénomène météorologique qui nous entoure est omniprésent, la tempête rugissant tout autour du continent, comme une bête prête à dévorer quiconque s’aventurerait trop près. Certaines de ses griffes tourbillonnantes s’étendent même sur le sol de Norlande, créant une frontière floue entre la terre et le chaos. L’équipage, tout en réparant le navire, discute à voix basse de ce que nous pourrions trouver ici. La curiosité est palpable, mais je sens également un frisson d’appréhension.
Je note dans mon journal que ces terres, si proches et pourtant si lointaines, semblent regorger de mystères. Les arbres sont étranges, la faune que nous avons aperçue l’est tout autant. Chaque bruit, chaque mouvement, est une invitation à explorer, mais aussi à rester sur nos gardes. Nous sommes peut-être les premiers à fouler ces terres, mais nous ne savons pas ce que Norlande a à nous offrir.
Pour l’heure, il faut réparer notre navire, mais je n’oublierai jamais ce sentiment d’avoir découvert quelque chose de grand, quelque chose qui pourrait changer notre destin à jamais.
Date : 24e jour du mois de Flamerule
Cela fait maintenant une semaine que nous avons quitté les griffes de cette tempête infernale. En repensant à ce 17e jour, je ne peux m’empêcher de ressentir une étrange gratitude mêlée d’appréhension. Ce chemin sûr que j’ai découvert, presque par hasard, a été notre salut. Les courants semblaient se plier à ma volonté, et les vents, pourtant si capricieux, nous ont accompagnés hors des ténèbres. Mais ce chemin, je ne peux me résoudre à le partager. Trop précieux, trop dangereux peut-être, entre des mains moins avisées. Je prends aujourd’hui la décision de le garder pour moi seul. Que ce secret reste enfoui dans mon esprit, jusqu’à ce que le besoin d’y recourir se fasse de nouveau sentir.
Date : 25e jour du mois de Flamerule
Le Nodus est enfin prêt à reprendre la mer. Je sens que l’équipage est soulagé, mais un sentiment d’inquiétude persiste. Avant de quitter ces terres, je dois rassembler tout ce que nous avons découvert et planifier notre retour à Astremer. Le Nodus va prendre le large, et je suis déterminé à ramener mon équipage sain et sauf… après tout, il nous faut affronter cette satané tempête à nouveau. Je ne serai pas une légende perdue dans les tempêtes.